Ventavon, destination finale… de nos déchets
Nous trions, à peu près tous, nos déchets… mais qu’adviennent-ils ensuite ?! Direction Ventavon, près de Tallard. Là-bas, on trouve un centre de tri et un site d’enfouissement. Deux visites ont été organisées mi-juin à destination des citoyens hauts-alpins volontaires. Tiffany Derouet s’est glissée dans l’un de ces convois.
Objectif de ces visites : sensibiliser au tri mais surtout, démystifier, expliquer, le fonctionnement de l’enfouissement de nos déchets. A Ventavon, les semi-remorques défilent du matin au soir, en provenance de tout le 05 et quelques communes limitrophes du 04.
Ce tour-operator donc, il débute au centre de tri. Gilet jaune sur le dos, nous nous arrêtons à chaque tas, chaque benne. On nous détaille le contenu et ce qu’il en adviendra une fois recyclé.
Qu’est-ce qui t’a marqué à cet endroit-là ?
Deux éléments font particulièrement jaser dans le groupe, le premier : les poubelles d’invendus des supermarchés. Des produits frais périmés, mais pas que ! Des packagings éventrés, à peine parfois, dont les consommateurs ne veulent pas, ou par exemple des packs de lait, dont une bouteille a fui. Bref, il y a encore un sacré travail à faire sur le gaspillage alimentaire…
Le second, c’est la montagne de papiers livrée le matin-même. On lisait le dépit sur le visage d’Olivier Pocchiolo, le responsable des lieux, il nous explique pourquoi :
En période touristique, été comme hiver, les erreurs de tri (volontaires ou non) se multiplient. Car bien souvent, les vacanciers trient moins bien en dehors de chez eux, et puis les règles ne sont pas les mêmes partout… Compliqué parfois de s’y retrouver.
Juste après, on vous a emmené sur ce fameux site d’enfouissement, est-ce que tu peux nous décrire à quoi cela ressemble ?
En arrivant, ce qui nous saute, à tous, aux yeux, c’est ce trou béant ! On nous explique qu’un site d’enfouissement est divisé en casier, qu’il y a en a trois à Ventavon. Ce trou, en l’occurrence, c’est le troisième casier, il est vide pour l’instant, mais prêt à accueillir ses premiers déchets. Car le premier est plein depuis 2007 et donc refermé, le second le sera le mois prochain !
Ces casiers sont de véritables boîtes hermétiques, qui empêchent la pollution des sols et des nappes phréatiques. Thomas Fache, chef de l’enfouissement à Ventavon.
Comment peut-on être sûr qu’aucune pollution ne s’échappe dans la Durance qui coule juste à côté ?
Des laboratoires privés prélèvent très régulièrement des échantillons d’eau, en amont et en aval du site. De telle façon qu’on s’assure que sa qualité n’ait pas été modifié au cours de son passage au niveau de l’enfouissement.
Qu’est-ce qui est enfoui exactement ?
Tu vois tes ordures ménagères, Simon ? Et bien, retenez-le, aucun tri n’est fait dans ces sacs noirs. Pas assez de temps, pas assez de bras non plus, neuf employés sur l’enfouissement. Donc chaque fois que vous avez la flemme de mettre un déchet recyclable dans le jaune, ou une bouteille dans le verre, pensez qu’il ou elle se retrouvera quelques jours plus tard sous vos pieds… On y enfouit aussi les déchets de chantier et ce qui n’a pas pu être recyclé au centre.
Concrètement, comment ça se passe un enfouissement ?
Les camions passent d’abord à la bascule, un pesage est réalisé. Plus il est chargé, plus la note sera salée pour l’expéditeur ! Puis, direction le casier n°2. Nous avons assisté à la suite pendant la visite justement : le semi-remorque dépose les tonnes de déchets qu’il contient. Tout de suite après, une tractopelle les écrase pour les comprimer et les enfouie aussitôt. C’est très impressionnant, et surtout, un peu, culpabilisant. Pourtant, tous les gens présents, moi compris, sont bien sensibilisés au tri.
Est-ce qu’il y a des nuisances olfactives sur le site ?
Oui clairement, l’odeur, elle prend aux tripes, mais on s’y habitue un peu. Thomas, lui, ne la sent même plus, après plus de dix ans à travailler avec.
Alors il faut quand même expliquer d’où elle vient… La dégradation des déchets produit un jus de poubelles, qu’on appelle lixiviat, très pollué, traité sur site. Elle libère aussi deux gaz, dont le méthane, qui est responsable de cette odeur. Pour la limiter, d’énormes efforts ont été réalisés. Malgré ça, suivant le sens du vent, les quartiers d’habitations proche du site la subissent encore.
Est-ce qu’il y a d’autres désagréments à vivre près d’un site d’enfouissement ?
Evidemment, niveau paysage, surtout ici en montagne, c’est assez difficile ! D’autant que, collé à l’enfouissement, il y a une carrière qui est exploitée. Forcément, la vue, ce n’est pas l’atout majeur de Ventavon.
Il y a aussi les oiseaux, des goélands précisément, une véritable colonie là-bas ! Ils se nourrissent des déchets à la surface du casier n°2. En soit, ce n’est pas forcément dérangeant. Le problème, comme les pigeons à Paris, c’est que les oiseaux défèquent un peu partout, notamment sur les zones habitées.
Et puis, on parlait de l’impact du vent dans la diffusion des odeurs… Et bien le vent c’est clairement l’ennemi numéro 1 car les déchets s’envolent et peuvent se retrouver dans les jardins, ou pire, la Durance, qui ne coule pas loin. Véolia, l’exploitant, tente réellement de limiter la casse de ce côté-là, voire même d’endiguer le phénomène.
Retenez ce chiffre : 72.000 ! Nombre de tonnes de déchets qui seront enfouies rien qu’en 2022 à Ventavon.
L’exploitation de ce site prendra fin en 2026, lorsque le troisième casier sera plein. Reste à savoir où seront alors enfouis nos déchets ? Véolia a d’ores et déjà déposé une demande d’agrandissement, c’est-à-dire creuser de nouveaux casiers. En cas de refus, il faudra trouver un autre lieu.