Photo : Mireille Coulon - PNE

L’église de Châteauroux-les-Alpes, précieux lieu de reproduction annuelle pour 600 chauves-souris

À Châteauroux-les-Alpes, la colonie de chauves-souris installée dans l’église va être auscultée de près durant trois ans par le Parc National des Écrins. Objectif : mieux comprendre le fonctionnement de ce gîte de reproduction pour pouvoir le préserver.

Parmi les mammifères, la chauve-souris reste un animal mystérieux. Même pour les professionnels, confesse Yoann Bunz, chargé de mission faune vertébrée au Parc National des Écrins.

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Ce sont des espèces très méconnues, même par nous, on apprend des choses tous les jours. Et donc c’est vraiment important qu’on puisse avoir cette connaissance fine sur les colonies qu’on connaît, et notamment cette colonie-là qui est particulièrement à enjeux.

Cette colonie, c’est celle qui élit domicile dans les combles de l’église Saint Irénée de Châteauroux-les-Alpes tous les ans entre avril et septembre. Sa population augmente régulièrement depuis qu’elle a été identifiée, il y a plus de 40 ans, pour atteindre dernièrement environ 600 individus adultes et une centaine de petits. Ce site est utilisé comme « gîte de reproduction » et est donc peuplé en grande majorité de femelles et de petits. Il s’agit de Grands Murins, voire possiblement aussi de Petits Murins.

En bref, c’est une « grosse colonie », utilisée « année après année », et qui représente donc « un gros intérêt », résume Yoann Bunz. D’autant que les chauves-souris sont protégées, tout comme leurs gîtes de reproduction.

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Les chauves-souris sont des espèces particulièrement sensibles. Il faut que des conditions particulières soient réunies pour qu’un site soit favorable, notamment en termes de reproduction, parce que les petits, quand ils sortent, ne sont pas du tout autonomes d’un point de vue thermique. Le point crucial dans ce type de gîte est que la température soit relativement stable pour que les petits puissent survivre. Donc il y a cet enjeu de préserver des conditions favorables et de comprendre ces conditions pour pouvoir garantir leur maintien au fur et à mesure du temps. Ce sont des espèces soumises à énormément de petits critères, c’est important de maîtriser l’ensemble du tableau pour pouvoir ensuite en garantir la conservation.

C’est pourquoi un projet d’étude et de valorisation est déployé en ce début d’année 2025 par le Parc National des Écrins. Baptisé « Voltigeuses de la nuit », il comprend deux volets : sciences et sensibilisation.

Comprendre la colonie et son fonctionnement

Sur le plan scientifique, il s’agira de comprendre ce qui rend cette église si favorable à la reproduction des chiroptères pour qu’elle puisse le rester. Le Parc étudiera notamment les abords du gîte.

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Nous allons essayer de comprendre quel va être le cheminement que vont utiliser les chauves-souris en sortant du gîte le soir. Parce que les chauves-souris, schématiquement, la tombée de la nuit, sortent, vont chasser, et reviennent au lever du jour. Et on sait que cette phase-là de la sortie du gîte est une phase très importante pour les chauve-souris : si elles ne sont pas en sécurité en sortie de gîte, il peut être considéré comme non favorable. Donc il va y avoir un suivi des routes de vol en sortie de gîte, avec des caméras thermiques, pour essayer justement de comprendre quels sont les éléments structurants dans le paysage, pour indiquer ceux qu’il conviendrait de ne pas bouger pour que le secteur soit toujours favorable à la circulation des chauves-souris.

Les gîtes secondaires, disséminés dans les alentours et utilisés ponctuellement par ces mammifères ailés, seront également recherchés pour pouvoir être préservés. Pour ce faire, des individus seront capturés et équipés de balises GPS.

Pour ce qui concerne l’intérieur de l’église, le comportement des chauves-souris sera scruté à la loupe.

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La colonie est regardée 24h sur 24 par des caméras et, en même temps, il y a des capteurs thermiques et d’humidité qui sont placés à différents endroits stratégiques. L’objectif étant de voir le comportement des individus selon la température et l’humidité. Et cette compréhension de l’utilisation de l’espace des combles par la colonie va vraiment nous nous être utile ensuite pour garantir que les conditions à l’avenir soient toujours favorables.

Enfin, la génétique des chiroptères chateauroussins intéresse aussi les scientifiques. Pour l’étudier, rien de plus simple : il suffit de ramasser régulièrement leurs crottes. Les analyses devraient renseigner sur les espèces présentes, l’évolution de leur régime alimentaire au fil de la saison, et leur microbiome intestinal.

Suivre en direct la vie des chauves-souris sur écran

Toutes ces études seront valorisées auprès du grand public. Et ce dans la Maison du Parc des Écrins qui se situe, c’est une chance, 100 mètres en contrebas.

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Les visiteurs pourront venir dans la Maison du Parc, il y aura un espace muséographique dédié au monde des chauves souris, et aussi un écran avec la possibilité de voir la colonie en direct, bien sûr sans aucun dérangement pour la colonie, ce sont des caméras infrarouges. Pouvoir vivre l’expérience de la nature, c’est important : on arrive à mieux conceptualiser ce qu’on doit protéger et ce qui nous entoure en faisant ces expériences-là.

Un film documentaire sur la colonie et ce projet sera également réalisé.

Le programme « Voltigeuses de la nuit », actuellement en période de lancement, comprendra deux années de collectes de données scientifiques, en 2025 et 2026, puis un an dédié à la mise en place de la communication grand public, en 2027.

Un projet similaire avait été conduit au Bourg d’Oisans il y a une dizaine d’années. Cette nouvelle étude permettra de comparer les résultats tout en bénéficiant de méthodes plus récentes.

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