Un an après la généralisation du tri des biodéchets, quelles solutions dans les Hautes-Alpes ?

Depuis un peu plus d’un an, les collectivités ont l’obligation de proposer aux habitants des solutions de tri des biodéchets, pour limiter la quantité de déchets enfouis ou incinérés, et de revaloriser cette matière organique. Zoom sur trois communautés de communes haut-alpines aux caractéristiques bien différentes.

Avec 60 mairies, la communauté de communes du Sisteronais Buëch doit composer entre des zones urbaines et d’autres très peu denses. Depuis la généralisation du tri des biodéchets le 1^er janvier 2024, elle s’est fixée comme objectif premier d’installer au moins un composteur partagé par municipalité. L’intercommunalité en compte 75 actuellement en fonctionnement, soit trois fois plus qu’en 2023. Ces points d’apports volontaires sont quasiment autonomes et ne nécessitent pas de collectes régulières.

De plus, en milieu urbain, la communauté de communes du Sisteronais Buëch s’est inspirée, comme celle de Serre-Ponçon et du Guillestrois-Queyras, d’un dispositif conçu dans le Briançonnais : les composteurs grutables. Explications d’Audrey D’heilly, chargée de mission prévention des déchets.

Ce sont des composteurs qui peuvent être collectés par nos camions poubelles et qui sont ensuite emmenés sur une mini-plateforme de compostage que l’on qu’on a créée sur la déchetterie de Ribiers. À terme, l’idée est que ces grutables puissent aussi aller composter directement dans les champs, puisqu’on a conventionné avec des agriculteurs pour qu’ils puissent récupérer la matière. Le grutable ça a fait un petit changement dans les comportements : au début, là où des composteurs collectifs ont été remplacés par des grutables, les gens n’ont pas forcément compris. On a fait du porte-à-porte pour sensibiliser, leur expliquer que le geste était le même et leur donner les consignes, des petits bioseaux pour qu’ils puissent collecter leurs biodéchets à la maison. Et c’est quelque chose qui fonctionne assez bien.

Audrey D’heilly

Les composteurs grutables ont l’avantage de permettre à la maturation de se faire in situ et de n’avoir besoin d’être collectés que lorsque les apports sont trop importants, ce qui limite le nombre de tournées à réaliser et donc les coûts de fonctionnement.

Les zones tests dans le Sisteronais Buëch ont démontré leur efficacité.

On s’est rendu compte, en prenant des prises de température, que le processus de compostage se mettait quand même en route à l’intérieur des grutables avant d’arriver sur la plateforme, puisqu’on avait des montées en température directement dans les composteurs. Et ensuite, quand on les emmène sur la plateforme, ça permet de tout brasser et de refaire des prises de température régulières. On voit que ça monte bien en température et que le compostage se fait bien.

Audrey D’heilly

Par ailleurs, une cinquantaine de composteurs autonomes ont été déployés en établissements scolaires, restaurants et entreprises.

Guilestrois-Queyras et Pays des Écrins : fort engouement des habitants

Dans le Guillestrois-Queyras et le Pays des Écrins, l’obligation de tri à la source avait été anticipée, mais la rapidité avec laquelle les habitants se sont appropriés les installations a pris de court Anne Chouvet, la présidente du SMITOMGA.

On a toujours peur des contraintes supplémentaires qu’on met aux gens, mais le fait de mettre les biodéchet dans le compost et puis de pouvoir récupérer le compost c’est vraiment bien passé dans les mœurs. Donc forcément, ça se ressent, c’est ça en moins [à enfouir ou incinérer]. Sachant qu’en plus le biodéchet c’est quelque chose qui pèse très lourd, et on est bien facturés au poids quand on amène ça à Ventavon dans la décharge du Beynon [gérée par l’entreprise Veolia].

Anne Chouvet

Aujourd’hui, 96 sites fixes et 28 sites grutables ont été déployés et, d’ici à 2028, l’objectif est de doubler le nombre total d’installations.

La matière organique collectée est envoyée sur deux sites, dont la capacité n’est plus suffisante pour supporter l’augmentation rapide des tonnages. La forte adhésion de la population va donc nécessiter de revoir les plans initiaux, explique Anne Chouvet.

C’est vrai que le site de compostage partagé qui roule son petit train train, avec les habitants qui apportent et se servent de ce qui a été maturé, c’est parfait, mais finalement ça marche tellement bien que on n’y arrive plus que dans certains petits endroits. Pour le reste, on se retrouve avec de la matière compostée ou en cours de compostage qu’il faut stocker et hygiéniser, et qu’on rende en vrai compost. Et avec des quantités qu’on n’avait pas prévues au départ. Ça s’est passé plus rapidement que ce qu’on pensait.

Anne Chouvet

Une « grosse réflexion » est en cours pour trouver un exutoire aux biodéchets collectés.

En parallèle des composteurs pour les habitants, plus de 70 sites autonomes sont déjà installés en établissement (restaurateurs, hébergeurs, écoles…).

À Serre-Ponçon, la plateforme de compostage ouvre en avril

Enfin, sur Serre-Ponçon, alors que la stratégie initiale consistait à installer des colonnes métalliques pour collecter les biodéchets, il a finalement été décidé en 2024 de s’appuyer là aussi sur un ensemble de composteurs fixes et grutables.

Le SMICTOM prévoit un lancement de sa plateforme de compostage le mois prochain. Elle permettra la production d’un compost labellisé et normé, compatible avec l’agriculture biologique, explique Pierre Vollaire, vice-président de la communauté de communes de Serre-Ponçon en charge notamment des déchets.

La plateforme de compostage à Pralong sera opérationnelle au mois d’avril de cette année et va permettre de transformer en compost les biodéchets, avec des usages très positifs de valorisation, notamment au niveau agricole ou pour mettre dans les bacs à fleurs de nos habitants.

Pierre Vollaire

Sur l’intercommunalité, 54 bacs grutables doivent être rajoutés d’ici le mois d’avril, en complément des 33 bacs fixes déjà en place.