Crise de l’accueil à Briançon, le Refuge Solidaire a voté sa fermeture
Mise à jour du 30/08/23 à 17h30 : Finalement, le Refuge Solidaire suspend sa fermeture « pour l’instant », a annoncé l’association ce mercredi dans le Dauphiné Libéré, puis à ram05. Jean Gaboriau, administrateur de la structure, évoque une baisse des effectifs, un manque de moyen pour l’évacuation, et une forte mobilisation de personnes extérieures, pour justifier ce revirement.
Le conseil d’administration des Terrasses Solidaires, le tiers-lieu où se trouve le foyer d’hébergement d’urgence à Briançon a voté la fermeture mardi 29 août. Depuis quelques jours, la structure accueille plus de 300 hommes, femmes et enfants pour une jauge normalement limitée à 81 personnes. Les risques sanitaires et sécuritaires sont trop importants et les équipes, bénévoles en majorité, sont à bout. Elles demandent à l’État l’ouverture d’un centre d’hébergement d’urgence.
La structure d’hébergement d’urgence installée au sein du tiers-lieu Les Terrasses Solidaires n’accueille plus d’exilé.e.s depuis hier soir. Depuis le week-end dernier, le foyer héberge des hommes, des femmes avec enfants, des mineurs, pour la plupart bléssé.e.s, choqué.e.s voire même traumatisé.e.s. Les équipes sont en sous-effectifs mais la vigilance reste accrue.
En effet, c’est sûrement nécessaire de fermer en termes de sécurité et de risque sanitaire. On ne peut plus proposer ce type d’accueil, ça s’est sûr. Mais notre premier message ça reste : quand est-ce que la préfecture va prendre conscience de cette problématique et prendre en charge l’hébergement de ces personnes ?
Isabelle Laure coordinatrice des actions Médecins du Monde à Briançon
Le nombre d’hébergé.e.s a atteint les 320 personnes pour une jauge normalement limitée à 81 places, le moindre espace est occupé, les risques sanitaires et sécuritaires sont donc trop importants. Après une cellule de crise lundi 28 et mardi 29 août, le conseil d’administration du tiers-lieu a voté la fermeture. Reste à organiser la clôture du lieu et le départ des hébergé.e.s, notamment les plus fragiles.
On va d’abord mettre en sécurité les familles, femmes et enfants en bas âge, avec les personnes les plus souffrantes et les très jeunes mineurs.
Jean Gaboriau, administrateur bénévole du Refuge Solidaires
Cette fermeture est aussi une action « coup de poing » qui vise à interpeller les pouvoirs publics. Rappelons que, d’après le code de l’action sociale et des familles, toute personne en situation de vulnérabilité sur le sol français, avec ou sans papier, a droit à un hébergement d’urgence pris en charge par l’État.
Nous on demande simplement un centre d’hébergement d’urgence, en plus du notre, dès qu’on dépasse la norme de sécurité de 81 personnes dans le bâtiment.
Jean Gaboriau, administrateur bénévole du Refuge Solidaires
Mais, selon la préfecture, l’hébergement d’urgence n’a pas pour vocation d’accueillir « les personnes en transit ». Marjolaine Bert, administratrice des Terrasses Solidaires, craint que la réaction des pouvoirs publics soit différente, avec un renforcement des forces de l’ordre et plus de répression.
Il n’y a pas « d’appel d’air ». Cette croyance fait beaucoup de mal et a des conséquences qui sont extrêmement graves.
Marjolaine Bert, administratrice des Terrasses Solidaires
Depuis mai dernier, les Terrasses Solidaires ont tiré la sonnette d’alarme à plusieurs reprises en insistant sur la nécessité de mettre en place des solutions d’accueil face à l’accroissement du flux migratoire. Aujourd’hui, la situation n’est plus gérable, mais une fermeture reste difficile à encaisser.
Émotionnellement, c’est lourd. On peut avoir le sentiment d’abandonner, […] il y a de la frustration, il y a de la peine, il y a de la colère.
Marjolaine Bert, administratrice des Terrasses Solidaires
Des frustrations qui créent des tensions dans l’équipe : tous ne sont pas d’accord pour la fermeture et beaucoup ne croient pas à une réaction positive de l’État.
Le maire de Briançon Arnaud Murgia leur donne raison. Ses réactions diffusées par nos confrères du Dauphiné Libéré sont loin d’être empathiques. Il qualifie les Terrasses Solidaires de « laboratoire d’expérimentation d’une extrême gauche plaidant pour une immigration massive et incontrôlée » et estime que « les Briançonnais n’ont pas à subir cela ».
Plus qu’à une crise migratoire, Briançon fait face à une véritable crise de l’accueil.