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Nouveau cri d'alarme du Refuge solidaire

Mettant à l'abri depuis 2017 les migrants arrivant d'Italie, les associations briançonnaises, réunies au sein des Terrasses solidaires alertent sur la saturation du lieu depuis début mai, avec plus d'une centaine de personnes hébergées. La préfecture des Hautes-Alpes reconnait qu'il n'y a « actuellement plus de places disponibles » dans le dispositif d'hébergement d'urgence du département, mais n'annonce pas de création de places pour autant.

Les associations regroupées au sein des Terrasses solidaires à Briançon affirment avoir alerté à plusieurs reprises depuis le 10 mai le préfet des Hautes-Alpes, Dominique Dufour, sur la saturation de ce lieu. Le bâtiment dispose de 64 places d’hébergement d’urgence. Depuis début mai, le nombre de personnes exilées accueillies atteint le double de cette capacité d’accueil, avec un pic à 136 personnes dimanche 21 mai. Jean Gaboriau, administrateur de l’association Refuges Solidaires, joint par téléphone lundi, rappelle que l'autorisation administrative du bâtiment, comme établissement recevant du public, est de 81 places.

Au quotidien, ça veut dire que le réfectoire sert de dortoir, que dans les petites salles de réunion, on met aussi des dortoirs. On arrive à répartir des gens aussi chez les hébergeurs solidaires, qui prennent quelques personnes. Soit des familles, soit des femmes et enfants, et la salle paroissiale Saint-Thérèse qui reste à notre disposition quelques nuits par semaine .

Jean Gaboriau, administrateur de l'association Refuges solidaires

Une saturation liée à des arrivées un peu plus importantes à la frontière franco-italienne, mais surtout à la rareté et à la cherté des transports publics qui empêchent les migrants de poursuivre leur route, selon ce bénévole.

Il y a un afflux un peu plus important d’Italie ces temps-ci. On ne sait absolument pas pourquoi, peut-être l’attitude du président tunisien voulant jeter les migrants dehors fait qu’il y a plus d’Africains qui étaient en attente qui partent plus vite. C’est possible, on ne sait pas. Par contre, ce qui est sûr c’est qu’au mois de mai, avec tous les ponts, il y a une offre de transports qui est plutôt défaillante. De surcroît avec la grève des aiguilleurs de la SNCF en Bourgogne qui affecte le train de nuit. Surtout la cherté des billets pendant les ponts fait que les exilés ne peuvent pas continuer leur parcours, tant que les billets sont à des prix prohibitifs.

Jean Gaboriau.

Les associations, qui ont également écrit à plusieurs élus locaux, dont le député des Hautes-Alpes Joël Giraud, demandent à l’État d’ouvrir des lieux complémentaires d’hébergement d’urgence.

C’est du ressort des pouvoirs publics de prendre en charge des gens qui sont à la rue, sans distinction d’origine. C’est dans la loi française.

Jean Gaboriau

Contactée par ram05, la préfecture des Hautes-Alpes nous a répondu par écrit que « d'importants crédits sont mobilisés pour l'hébergement d'urgence dans le département qui dispose de 175 places d'hébergement réparties entre les communes de Gap et de Briançon » mais qu’il n’y avait « actuellement plus de places disponibles dans ce dispositif ».

La préfecture ajoute que le « dispositif » des Terrasses solidaires ne fait « pas partie du dispositif État de l'hébergement d'urgence tel que coordonné et géré par nos services ».

« Généralement, les personnes accueillies au Refuge Solidaire puis aux terrasses solidaires sont en transit sur le territoire français avant de repartir vers d'autres pays ou d'autres régions de France, en situation irrégulière, et ne sollicitent pas d'accompagnement social pour une éventuelle intégration sur le territoire haut-alpin », précise la préfecture.

Interrogé en février 2023 dans l’émission « La Vie publique » sur le manque structurel de places d’hébergements d’urgence à Briançon, le préfet des Hautes-Alpes Dominique Dufour avait confirmé que les hébergements d’urgence « ne doivent pas être mobilisés en fonction de la nationalité ou de la situation de tel ou tel ». Il avait assuré que « globalement, on ne fait pas de tri ». Avant de rejeter toute responsabilité sur les associations qui assurent seules depuis 2017, l’accueil des personnes exilées dans le Briançonnais.

Je comprends tout à fait qu’il y ait un certain nombre de personnes qui interviennent pour l’assistance aux migrants et d’ailleurs je les rencontre, on en discute. La réponse que j’ai à vous faire sur ce sujet c’est qu’il y a un dispositif de droit commun qui est mis en place par l’État et il est ouvert à tout le monde et puis ensuite, si pour des raisons que je comprends tout à fait les associations veulent intervenir pour l’accompagnement et l’assistance aux migrants, dont je répète mon rôle premier est de faire en sorte qu’ils ne viennent pas de manière irrégulière en France, et bien c’est leur responsabilité.

Dominique Dufour, préfet des Hautes-Alpes

L'intégralité de cette interview, diffusée le 24 février 2023, est à retrouver sur notre site, de même que notre magazine sur les Terrasses solidaires, diffusé le 5 décembre 2022 : « Terrasses solidaires : après un an d'accueil des exilé·e·s, le tiers-lieu briançonnais veut lancer son second volet »