Plateforme de compostage, réseau de composteurs… Serre-Ponçon met les bouchées doubles pour valoriser ses biodéchets en fertilisant haut de gamme
Sur la Communauté de Communes de Serre-Ponçon, le tri des biodéchets pourrait connaître un coup d’accélérateur avec le lancement de la plateforme de compostage d’Embrun et le déploiement de composteurs grutables. En détournant ces matières organiques de l’enfouissement, la collectivité limite les émissions de CO2, le montant de la redevance sur les ordures ménagères et produit un fertilisant pour les particuliers et les agriculteurs.
« Cette plateforme de compostage est la seule plateforme publique de la région PACA, s’est réjouie Chantal Eymeoud lors de son inauguration le 10 juin 2025. Un choix opéré pour maîtriser les coûts et les techniques adoptées » a précisé la présidente de la Communauté de Communes de Serre-Ponçon.
Aujourd’hui, sur les 4 000 tonnes d’ordures ménagères collectées par Communauté de Communes partant à l’enfouissement, 1 200 sont des biodéchets dont 850 seraient « captables ». À terme, le SMICTOM estime pouvoir en détourner 500 et en recevoir la même quantité du Guillestrois-Queyras. La directrice du SMICTOM Caroline Ruiz retrace le cycle de vie des matières organiques sur la plateforme.
Le camion vide les biodéchets sur la dalle prévue à cet effet, où l’on récupère l’intégralité des jus pour traitement. L’opérateur de tri enlève les indésirables qui pourraient être présents, éventuellement des sacs plastiques ou des couverts. Ensuite, ces biodéchets seront mélangés avec le broyat de déchets verts qui est stocké dans un autre casier. Une fois ce mélange effectué, les déchets seront amenés vers des casiers de fermentation où un dispositif d’aération forcée par des gros ventilateurs insufflent de l’air directement sous les tas de biodéchets mélangés avec les broyats. Cette phase-là va durer à peu près un à deux mois en fonction de la période de l’année dans laquelle on se situe et en fonction des températures extérieures. L’objectif de cette phase est d’atteindre l’hygiénisation du produit. Pour cela, trois jours sont nécessaires à 65°. On mesurera la température en continu par des sondes qui sont situées à l’intérieur de ce tas de déchets. Ensuite, une fois la fermentation effectuée, on déplace ces déchets vers le casier de maturation et là, par retournements successifs, on effectue des prises de température manuelles pour éviter une dégradation trop rapide du produit. Ce procédé dure environ 4 mois.
Caroline Ruiz, directrice du SMICTOM
Un fertilisant aux exigences bien supérieures aux normes européennes
Le SMICTOM veut produire un compost labellisé ASQA – Amendement Sélectionné Qualité Attestée, un niveau de certification qui permet une utilisation en agriculture biologique. Ses exigences sont supérieures aux normes européennes qui sont pour le moment « relativement succinctes » explique Thomas Colin, appui technique et labellisation ASQA. En effet, « celles-ci ne prévoient pas nécessairement de contrôle sur les déchets verts et ne fixent de seuils que pour les métaux lourds. À l’inverse, le label ASQA couvre également le plastique et d’autres polluants organiques. »
En fin de processus, le compost obtenu « sera criblé pour garantir une maille compatible avec les usages des différents utilisateurs du produit fini : agriculteurs et habitants principalement » conclut Caroline Ruiz.
Des composteurs supplémentaires pour mailler l’ensemble du territoire
Un réseau de composteurs grutables est en cours de déploiement sur l’ensemble de la Communauté de Communes. Dans ce type de bac, le compost peut maturer de manière quasi-autonome et son volume réduit au fur et à mesure que l’eau est évacuée des biodéchets. Contrairement aux colonnes qui nécessitent une collecte à fréquence fixe, les composteurs grutables sont vidés uniquement lorsqu’il sont remplis. Pour les habitants, leur utilisation est la même que celle des composteurs collectifs classiques.
Ils sont installés à côté d’autres bacs, autres ordures ménagères, emballages ou verre. Chacun peut apporter ses biodéchets directement et y ajouter un peu de structurant qui est dans un bac qui est à côté et qui permet de diminuer les jus et les odeurs si l’on recouvre les biodéchets apportés.
Marc Audier, président du SMICTOM
En revanche, ils impliquent une surveillance régulière de la part des agents du SMICTOM explique Marc Audier, président du SMICTOM.
On s’adapte en fonction du remplissage pour collecter quand ils sont pleins. Le travail des agents du SMICTOM c’est de bien vérifier que le structurant est mis et qu’il est suffisamment souple pour être pris par les usagers qui veulent le mettre dessus. Ils enlèvent également tout ce qui a été mis par erreur par les usagers.
Marc Audier, président du SMICTOM
Au-delà de l’obligation en vigueur depuis le 1er janvier 2024 pour les collectivités de mettre à disposition une solution de tri des biodéchets à la source pour les habitants, les enjeux sont multiples pour la Communauté de Communes. Car détourner les matières organiques des déchets enfouis, c’est éviter des émissions de gaz à effet de serre liées à leur mauvaise fermentation, les valoriser en fertilisant, limiter les coûts d’enfouissement et donc le montant de la redevance sur les ordures ménagères et augmenter la durée de vie de la décharge actuelle. Et côté usagers, moins de tonnes enfouies, c’est la garantie d’une redevance sur les ordures ménagères moins élevée.
L’opération a coûté 1,7 millions d’euros financés à 50% par l’ADEME et la Région PACA. Cet été et dans six ans, des études de caractérisation des déchets seront menées pour évaluer l’évolution des pratiques de tri. Car maintenant que le dispositif est en place, il faut encore transformer l’essai en obtenant l’adhésion et la participation des habitants. Pour cela, le SMICTOM prévoit la lancement prochain d’une campagne de communication autour du tri des biodéchets.