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Motoneige à des fins de loisirs : l’interdiction par la loi « de plus en plus confirmée par les différentes instances judiciaires »

Orcières, Dévoluy, Montgenèvre, Serre-Chevalier… nombreux sont les domaines skiables à proposer les balades en motoneige comme loisir. Une pratique pourtant interdite en France par une loi inscrite au code de l’Environnement depuis 1991. Dans une affaire opposant l’entreprise Espace Gliss aux associations France Nature Environnement Isère et Mountain Wilderness, la Cour de Cassation a rendu le 19 novembre un arrêt confirmant leur illégalité sur le domaine skiable de Chamrousse. Une décision susceptible de mettre à mal les contestations de cette loi régulièrement faites par les professionnels de la motoneige de loisir.

Les écosystèmes de montagne sont riches, mais sensibles. Particulièrement en hiver, où des espèces emblématiques comme le tétras lyre et le lièvre variable se réapproprient les domaines skiables en fin de journée, quand la fréquentation humaine diminue. « Chaque dérangement supplémentaire impose [à la faune] de puiser dans ses réserves pour arriver à passer cette période hivernale critique, explique sur son site l’Office Français de la Biodiversité, précisant que les engins motorisés de type motoneige, en permettant d’accéder facilement à des zones reculées ou la faune jouit de la quiétude, hypothèque directement leur capacité de survie. »

Depuis 1991, le code de l’Environnement encadre strictement l’usage des engins conçus pour la progression sur neige sur les domaines skiables. 1991, c’est justement l’année de la naissance du premier syndicat de défense des professionnels de la motoneige, le SNPQM. Lors d’une mobilisation à Gap le 19 septembre, Christophe Tison, le président du Syndicat National des Professionnels du Quad et de la Motoneige, donnait son point de vue à la préfecture. La lecture de la loi faite par ses services serait « trop rigoriste », voire « idéologique ». D’après leurs avocats, certaines communes proposeraient cette activité en étant « totalement en règle ».

Avec cet arrêt de la Cour de Cassation, la position du SNPQM sera désormais difficile à défendre, selon Vincent Neirinck, référent « Protection de la montagne » pour l’association Mountain Wilderness.

La loi prévoit deux dérogations à cette interdiction, c’est le petit circuit du style « kart » au pied de la station dans lequel vous faites des serpentins dans un terrain délimité, clôturé, avec une seule entrée et qui est spécifiquement dédié et autorisé pour ça. Et il y a aussi la possibilité récente de convoyer des clients avec des motoneiges ou des dameuses vers certains restaurants d’altitude qui ont obtenu une autorisation spécifiques pour cela et dans des conditions très très particulières, en particulier qui interdisent que ce soit les clients qui conduisent, car il s’agit d’une offre de transport et non pas une offre de loisir, de randonnée ou de balade. Mais dans ce cadre là, un certain nombre d’opérateurs proposent malgré tout des randonnées en motoneige, souvent sur les pistes en fin de journée avec une convention avec la mairie ou l’exploitant des remontées mécaniques. Sous couvert de cette autorisation délivrée disent « moi j’ai le droit ». Et c’est finalement ce que cet arrêt de la Cour de Cassation met au clair : « non, vous n’avez pas le droit, la circulation en motoneige à des fins de loisir y compris en fin de soirée sur les domaines skiables pour vous balader »

Depuis quelques années, fleurissent les balades en dameuse à la fermeture des pistes. Celles-ci sont également visées par le code de l’Environnement et l’arrêt de la cour de cassation, rappelle Vincent Neirinck.

C’est exactement la même chose, la loi ne parle pas d’ailleurs de motoneige mais d’engins conçus pour la progression sur neige. Donc que ce soit un quad, un char d’assaut ou une dameuse vous n’avez pas le droit donc c’est réglé de ce point de vue là.

Pour que le cas de Chamrousse serve d’exemple, Mountain Wilderness a contacté plusieurs préfets de montagne pour pointer le fait que « la loi est de plus en plus confirmée par les différentes instances judiciaires. »

Dans les Hautes-Alpes, FNE PACA et son antenne départementale, la SAPN, ont porté une affaire similaire devant le tribunal administratif de Marseille. En 2018, le maire de la commune d’Orcières avait fait valider par son conseil municipal une convention de mise à disposition de circuit de motoneiges sur le domaine skiable. Faute de réaction de la part des services de l’État, les associations ont déposé un recours. L’arrêt de la Cour de Cassation conforte aujourd’hui la SAPN FNE 05 dans ce qu’elle pense, explique à ram05 Bernard Patin, à savoir que « la pratique Dévoluy, Montgenèvre, Serre-Chevalier, est totalement illégale. L’association attend désormais la décision du tribunal de Marseille pour l’affaire d’Orcières car si elle a choisi de s’attaquer à ce cas particulier, la SAPN FNE 05 espère qu’il fera jurisprudence, et compte ensuite demander aux services de l’État d’aller de verbaliser les pratiques illégales.

Si Mountain Wildernessse montre intransigeante sur ces pratiques, c’est aussi quelle les jugent en contradiction avec les engagements affichées des domaines skiables de diminuer leur impact environnemental, explique Vincent Neirinck.

La montagne est un des derniers espaces de nature de silence, de beauté que l’on peut offrir à l’échelle européenne. On est à 80 à 80% à habiter en ville. La montagne finalement c’est ce dernier refuge. Il ne faut pas en faire une contrainte mais une chance. Les stations commencent à le comprendre, de même que les enjeux liés au changement climatique. On a des actions qui sont menées pour minimiser l’impact environnemental [dans les stations], donc il y a une cohérence réelle à ne pas inciter les visiteurs à s’y rendre en bus vertueux pour les mettre sur une motoneige vrombir au milieu de la montagne à peine descendus de leur moyen de transport vertueux. […] On ne peut pas dire il faut faire de gros efforts pour limiter les émissions de gaz à effet de serre et continuer à faire des loisirs motorisés à travers toutes les montagnes.