À La Passerelle, un jeune public et une table-ronde pour s’attaquer au « poids des normes » liées au genre
« Norman, c’est normal à une lettre près ». Le spectacle entend se moquer des conformismes en mobilisant davantage les ressorts de l’humour et de la joie que ceux du militantisme. La mise en scène pop, tonique et colorée pourrait d’ailleurs bien saisir les spectateurs au point de leur donner une furieuse envie de danser. Ce jeune public proposé à La Passerelle, outre les trois représentations scolaires, sera également donné en public les mercredi 20 et samedi 23 novembre.
Norman, c’est un petit garçon comme les autres, à ceci près qu’il aime porter des robes tournicotantes. Et ses parents l’acceptent tant bien que mal. Un jour, ils l’autorisent à se rendre à l’école dans sa tenue favorite. Mais les moqueries et les insultes vont vite ternir sa joie. À l’origine de ce scénario, il y a un fait réel qui a marqué Clément Thirion, le metteur en scène.
En Allemagne, un père avait décidé de porter des robes en solidarité avec son fils qui voulait porter des robes pour aller à l’école. Cela se passait à Berlin, avant qu’ils ne déménagent dans une autre ville. Ce que j’ai aimé, c’est que plutôt que ce soit le fils qui se conforme à ce qu’on attend de lui, c’est le père qui a fait un pas vers lui en mettant des robes.
Une pièce, de théâtre avant tout, mais qui accorde cependant un rôle particulier à la danse, explique Clément Thirion.
C’est vraiment une histoire qui se raconte avec du texte, qui a été écrit par Marie Henry, dans lequel s’insèrent des moments dansés qui sont inclus dans le texte et dans l’histoire et dans la narration. Et c’est en cela que c’est entre guillemet « hybride », parce que la danse a vraiment une dimension dramaturgique, elle n’est pas juste là pour illustrer, égayer. La danse raconte quelque chose qui est inclus dans l’histoire. Elle exprime des points de vue un peu différents du texte. Par exemple, à un moment donné, on voit le point de vue des institutrices sur Norman, lors de la préparation de la fête de fin d’année, où elles sont un petit peu revêches et puis tout d’un coup il y a de la musique, elles se mettent à danser et on comprend qu’en fait c’est elle qui s’éclatent sur la musique et veulent s’amuser. C’est l’un des exemples où la danse vient raconter quelque chose en plus que le texte.
Avec cette pièce, Clément Thirion espère contribuer à son échelle à relativiser les normes en place, notamment sur les questions liées au genre, plutôt qu’à en créer de nouvelles.
En changeant une norme, on remplace juste une norme par une autre. J’ai l’impression, et là je dis ça avec des pincettes, qu’on a besoin d’un cadre, de valeurs, de points de repères… j’estime que c’est peut-être normal. Et encore, c’est un point d’interrogation. En tout cas, il faut en effet questionner cette norme, ces repères, ce cadre et se dire que ceux qui n’y sont pas ne sont pas des OVNI mais des personnes avec d’autres repères, d’autres envies, d’autres cadres. Je crois que si on pouvait considérer le monde et la différence avec curiosité plutôt que rejet, l’on ferait par contre un grand pas.
En lien avec « Norman » et « Discussion avec DS », La Passerelle organise une table ronde sur la question des stéréotypes de genre et comment les regards dans leur diversité participent de leur déconstruction, à travers le spectacle vivant, le cinéma, la littérature… mardi 26 novembre à 18h30 à l’entresort du théâtre en entrée libre. Elle sera coanimée par le directeur de La Passerelle Christian Lalos et la déléguée départementale aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les hommes des Hautes-Alpes Joanna Della Rosa, avec pour invités : Léa Djeziri, autrice de bande dessinée et illustratrice pour la jeunesse et la presse ; Lucie Geffroy, cofondatrice et corédactrice en chef du journal La Déferlante ; Océane Perona, autrice ; Raphaëlle Rousseau, comédienne et autrice ; Clément Thirion, metteur en scène.