Hautes-Alpes : ça sent le sapin pour l’école du bois
Le projet d’école du bois et de la forêt dans les Hautes-Alpes est compromis : le site d’implantation prévu à l’Argentière-la-Bessée ne séduit plus. De plus, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur se voit reprocher un manque de soutien.
Article mis à jour le 09/08/24 avec la réaction de Florian Court.
Créer une Haute École du Bois et de la Forêt dans le département, pour constituer un campus européen de formation à ces métiers : telle était l’ambition portée notamment par la communauté de communes du Pays des Écrins depuis quelques années. Deux sites d’implantation étaient prévus : L’Argentière-la-Bessée et Embrun.
Mais le dossier est désormais sérieusement fragilisé, comme l’a dévoilé le Dauphiné Libéré ce vendredi. L’école du bois paraît aujourd’hui empêtrée dans un imbroglio au sein duquel région et responsables locaux se renvoient la balle.
« Le projet est pour l’instant fortement arrêté », a ainsi confirmé à ram05 Alain Sanchez, maire de L’Argentière-la-Bessée. La cause de ce coup de théâtre, d’après l’élu : l’école qui devait porter les formations et les Compagnons du devoir auraient annoncé fin juin qu’ils « ne souhaiteraient pas venir sur L’Argentière parce que le site [prévu sur la friche industrielle des FAP, Fonderies et Aciéries de Provence] est trop excentré ou trop loin du centre de vie ».
Si rien ne semble définitif, le projet est pour l’instant dans une impasse, constate l’élu.
Il est mal engagé. Mais la décision d’arrêter le projet n’est pas prise.
Alain Sanchez
Le maire de L’Argentière-la-Bessée précise continuer à travailler sur le dossier depuis ce coup dur, tout en étant « fortement refroidi ».
À ce revirement s’ajoute un autre handicap : un soutien de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur jugé insuffisant.
De la part de la région, pour l’instant, on n’a pas eu vraiment un soutien franc massif. On a simplement eu un courrier de Renaud Muselier qui nous a dit qu’il était fortement intéressé par cette haute école du bois. Mais on n’a pas eu vraiment d’adhésion forte.
Alain Sanchez
Problème : c’est la région qui porte la gestion de l’enseignement supérieur, souligne Alain Sanchez.
Forcément, tant que la région ne s’impliquera pas plus que ça et ne nous apportera pas un vrai soutien, c’est sûr qu’on aura du mal à faire quelque chose.
Alain Sanchez
Chantal Eymeoud, maire d’Embrun, ville concernée par le projet, et vice-présidente de la région, dément formellement ces allégations : « la région a toujours soutenu fortement ce projet, c’est totalement faux de dire le contraire », affirme l’élue à ram05, ajoutant que « le président Muselier a soutenu ce projet par courrier », et qu’« il n’y a aucune ambiguïté ». « La région a bien sûr validé le projet mais ne peut pas s’engager sans les garanties économiques et financières. Je n’ai pour ma part pas d’information officielle d’abandon », assure Chantal Eymeoud.
Selon l’élue, la région aurait proposé la mise à disposition gratuite de l’ingénierie de son agence de développement économique risingSUD « pour accompagner l’association [porteuse du projet] dans ses études économiques et financières ». Une offre qu’aurait refusé son directeur Florian Court, affirme Chantal Eymeoud.
L’intéressé réfute. Florian Court assure à ram05 avoir pris contact avec risingSUD en décembre, avoir transmis une note technique pour imaginer cette collaboration, mais que la région a manqué à l’appel pour la concrétiser.
De toute manière, cette aide n’aurait pas suffi, estime l’ancien directeur et unique salarié de l’association dissoute depuis février dernier. Cette structure avait besoin d’embaucher au moins trois personnes pour gérer la masse de travail : « créer une école d’ingénieur en partant d’une feuille blanche au XXIème siècle, c’est la première fois en France que cela se faisait, et seul c’est quasi impossible ». Alors que les organismes privés, le département et les deux communautés de communes concernées ont donné leur accord pour des financements, la région n’a pas voté la demande de subvention nécessaire à ces nouveaux salariés, regrette Florian Court. Un revers qui a découragé les partenaires et donc bloqué le projet, privés et région demandant des garanties financières les uns des autres, relate l’ex-directeur.
Pour que l’école puisse espérer rebondir, il faut que la région montre un engagement concret pour permettre l’embauche d’une équipe projet, analyse Florian Court. Alain Sanchez attend lui aussi davantage d’implication de la part des élus régionaux.
J’ai une bonne relation avec Chantal. Oui, la région nous soutient, Chantal est fortement impliquée là-dedans. Par contre, moi je dis que l’exécutif de la région ne s’implique pas bien plus que ça. Un simple courrier de Renault Muselier ne suffit pas à rassurer les investisseurs qui seraient prêts à s’engager là-dedans.
Alain Sanchez
Quelle suite désormais ? Tenter d’obtenir « l’adhésion de la région et plus de volonté de porter ce projet sur les Hautes-Alpes », déclare le maire de L’Argentière-la-Bessée. « La région doit démontrer que ce projet lui tient à cœur, qu’elle s’engage dedans et qu’elle nous aide vraiment », insiste Alain Sanchez.