Un an après la fermeture, Les Jouets du Queyras se relancent et font peau-neuve
L’entreprise centenaire basée à Arvieux a rouvert ses portes début juillet après une fermeture en 2023. Désormais constituée en association en vue d’évoluer en Société Coopérative d’Intérêt Collectif à l’automne, celle-ci teste un nouveau positionnement pour s’adapter aux attentes d’un public qui a évolué.
Fondée en 1920, l’entreprise Les Jouets du Queyras était l’une des plus anciennes SCOP de France, si bien que sa fermeture avait pu donner l’impression qu’une page de l’histoire du Queyras se tournait. Mais l’idée d’une relance a rapidement fait son chemin, en tenant compte des enseignements du passé. Mathieu Sibille, président de l’association Les Jouets du Queyras, liste plusieurs facteurs qui avaient selon lui occasionné une perte de vitesse de l’entreprise, jusqu’à son placement en liquidation.
Fatalement, le Covid avec une baisse de fréquentation. Peut-être un manque de renouvellement des gammes, le fait que l’ancienne équipe était partie sur une machine à commandes numériques qui avait l’avantage de pouvoir fabriquer des jouets en grande série plus facilement mais qui occasionnait aussi un surcoût car une commande numérique n’économise pas le bois autant qu’un humain. Une commande numérique ne fignole pas et donc il faut aussi du temps finalement pour poncer et ébavurer les jouets. […] Et puis après il y a une conjoncture, les concurrences chinoise et allemande avec des jouets de qualité. C’est pour ça que nous on se place plutôt sur de l’innovation, d’une certaine manière sur la mélancolie, et sur le fait que les jouets soit fabriqués à la main par des gens passionnés.
Pour valider ce positionnement sur un marché que Mathieu Sibille qualifie « d’achat coup de cœur », Les Jouets du Queyras ont fait l’expérience de placer dans ses rayons des jouets fabriqués ailleurs, ou d’autres type d’objets comme les mugs souvenirs. Le résultat est parlant, les clients ont boudé tout ce qui n’était pas en bois ou de conception queyrassine, assure le président de l’association.
Afin de renouer avec un budget équilibré, l’association joue désormais sur deux tableaux, ou plutôt deux gammes de jouets.
Un axe principal, c’est de recréer les jouets emblématiques, historiques, qui sont donc des figurines d’animaux de la ferme et d’animaux de montagne, en bois, découpés à la main avec des scies à chantourner, puis peints à la main avec des peintures agréées pour les enfants. On est aussi parti dans une optique de créer des nouveaux produits afin de créer des nouveaux marchés, des nouvelles envies, plus dans l’air du temps […] par exemple, des triplettes de boules carrées pour que les gens puissent jouer aux boules dans les alpages. […] On est parti aussi sur deux petits jeux de société faciles à emporter dans les valises : le « Sixième sens » et sorte de « Mémory » avec des petites quilles et un dé.
En deux mois, l’équipe a dû récupérer un bâtiment, réinstaller les machines, redécorer le magasin et fabriquer pour débuter l’été avec du stock. À l’automne, l’association doit évoluer en Société Coopérative d’Intérêt Collectif. Mathieu Sibille explique l’avantage de ce type de structure par rapport à la précédente.
L’ancienne entité, qui était une SCOP, ne permettait qu’aux salariés d’être actionnaires. Avec cette SCIC, on part sur un format complètement différent. C’est toujours une coopérative, donc économie sociale, solidaire, mais qui permet à des entités extérieures, personnes physiques ou morales, d’intégrer le capital social. Autant des collectivités que des associations, des particuliers, salariés, ce qui permet de collecter beaucoup plus de parts sociales et d’avoir un vrai échange et un vrai développement économique. On peut développer les subventions, ou aller voir un banquier en disant « on n’est pas tout seul, vous voyez, on a 30 000 euros de parts et on est 100 personnes ». Pour la banque, c’est plus sérieux qu’un salarié qui veut demander un prêt à une banque.
Aujourd’hui, les jouets du Queyras ne se trouvent que dans l’atelier-boutique d’Arvieux, mais l’association veut rapidement lancer le dépôt-vente dans d’autres magasins du Queyras. Dès l’automne, un site web de vente en ligne sera mis sur pied, même si l’association ne la voit pas comme comme un marché très prometteur. Jusqu’à fin septembre, l’entreprise est en phase de test avec une équipe de deux temps-plein en « fabrication, vente et conception » et un mi-temps pour « découpe en atelier ».