Accélération des procédures, brigade environnement, surpopulation carcérale… Le bilan 2024 du parquet de Gap
L’audience solennelle de rentrée du tribunal judiciaire de Gap s’est déroulée le 31 janvier dernier. La procureure Marion Lozac’hmeur y a présenté le bilan de sa première année à la tête du parquet et ses orientations pour 2025.
Poursuivre plus et plus rapidement : c’est l’un des mots d’ordre qu’a adopté le parquet de Gap en 2024. Le nombre d’affaires reçues, environ 11 000, et de celles poursuivables, près de 3 000, est à peu près constant par rapport à l’année précédente. Par contre, les procédures qui ont impliqué un déferrement, c’est-à-dire une présentation immédiate auprès du tribunal après une garde à vue, ont augmenté de 40 %, rapporte Marion Lozac’hmeur, procureure.
Notre objectif, c’est d’essayer de répondre de façon adaptée à chaque type d’infraction. Et ce n’est pas forcément toujours la réponse la plus grave, on fait aussi beaucoup, beaucoup d’alternatives aux poursuites, elles ont aussi augmenté. [Notre objectif est que ces réponses soient] graduées, adaptées et rapides quand il y en a besoin.
Résultat : les délais sont actuellement de deux mois, « ce qui est très court », souligne la procureure de Gap.
Cela se retrouve notamment dans le champ des violences aux personnes, et en particulier des violences intrafamiliales : « on a des modes de poursuite particulièrement rapides », avec l’objectif « qu’il n’y ait plus aucune plainte de victime qui ne soit plus prise en charge », déclare la magistrate.
À la fois par des poursuites rapides, des comparutions immédiates, des réquisitions de mandats de dépôt ou des réquisitions de placement sous contrôle judiciaire pour organiser la séparation entre l’auteur et la victime, et puis par de la mise en place d’instances d’échanges sur des thématiques comme par exemple les violences intrafamiliales et le soin, les violences intrafamiliales et le logement. Sur la thématique du logement, la question de l’éloignement ce n’est pas simplement une mesure juridique, c’est aussi de pouvoir loger l’auteur ou la victime et d’ailleurs, on préfère éloigner l’auteur plutôt qu’obliger la victime à partir du domicile.
De plus, le tribunal dispose de 24 téléphones grave danger, et 2 bracelets anti-rapprochement ont été posés l’an dernier.
En plus des violences aux personnes, la lutte contre la délinquance organisée est la seconde priorité que Gérald Darmanin, garde des sceaux, a rappelé aux procureurs de la république récemment. Dans les Hautes-Alpes, elle se traduit surtout par le trafic de stupéfiants. Sur ce sujet, « de très nombreuses opérations ont été programmées avec la police et la gendarmerie » en 2024 avec un mode d’action « affiné » qui permet d’« annihiler » tout ou partie de réseaux locaux, détaille Marion Lozac’hmeur.
Concernant les spécificités locales, la procureure de Gap rappelle la création en juin dernier d’une brigade spécialisée dans les infractions à l’environnement.
Cette brigade a l’immense atout d’être composée d’officiers de police judiciaire formés, à la fois très pointus juridiquement et très pointus techniquement sur le droit de l’environnement, qui est un droit compliqué. Elle agit seule ou en collaboration avec tous les autres services de l’État, l’Office français de la biodiversité, l’Office national des forêts, le parc bien sûr, pour des opérations de contrôle ou des enquêtes au long cours qui nécessitent une grande technicité. Cela nous permet d’avoir des enquêteurs experts et c’est une énorme plus-value. Par exemple, la brigade intervient sur des abandons de véhicules et on a quelques dossiers d’abandons très importants. Ou encore sur le Rallye Monte Carlo, ils étaient sur la question des feux, sur la question des abandons de déchets. Et donc oui, je pense que ça a été mieux traité que l’année dernière.
Autre particularité haut-alpine : la présence d’une frontière avec l’Italie. À ce niveau-là, « l’activité pénale a beaucoup diminué » suite à l’arrêté du conseil d’État de février 2024 réduisant les possibilités de procéder à des refus d’entrée. Cela a eu pour conséquence de réduire le nombre d’interpellation de passeurs, constate la magistrate.
Au chapitre des points noirs de l’année, Marion Lozac’hmeur cite la surpopulation carcérale à la maison d’arrêt de Gap. Un phénomène récent, qui reflète une problématique nationale.
La maison d’arrêt de Gap comporte une trentaine de places et aujourd’hui l’effectif est bien au-dessus de 40, donc c’est une surpopulation qui est importante. Et ce qu’il faut aussi réaliser, c’est que c’est une maison d’arrêt assez ancienne, assez petite, en centre-ville, et dans ce bâtiment la surpopulation, qui s’incarne par des matelas par terre, est particulièrement difficile à gérer. Donc on y est très attentifs. Mais on est tous pris par la délinquance, par la nécessité d’incarcérer ceux qui doivent l’être. Et toutes les autres prisons du sud ont aussi les mêmes difficultés. On y réfléchit tous, par la question de l’aménagement, du développement du travail d’intérêt général. Ici, on attend la réouverture du quartier de semi liberté qui à mon avis va quand même être une bouffée d’oxygène puisqu’il comptera 6 places.
En 2025, la procureure de Gap ambitionne de maintenir les délais courts atteints l’an passé sur les procédures pénales, et d’approfondir les partenariats et les échanges, par exemple avec les services de l’État, ce qui permettrait d’améliorer le traitement des contentieux « très techniques », comme les fraudes.