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Un atlas « exceptionnel » et mystérieux du XVIIème siècle a été acquis par le département des Hautes-Alpes

Les cartes uniques et inconnues jusqu’alors ont intégré les collections des archives départementales en attendant d’être restaurées puis dévoilées au public.

C’est à la faveur d’une vente aux enchères à Lyon le 4 septembre dernier que les archives départementales des Hautes-Alpes ont appris l’existence d’un atlas regroupant 58 cartes, la plupart du Dauphiné, réalisées par un certain « Jean Videl de Briançon », dont on sait peu de choses, entre 1661 et 1663. Le droit de préemption de l’État a permis de s’assurer que l’objet, auparavant propriété d’une famille de collectionneurs, serait acquis par le département.

Pierre Fabry, directeur des archives départementales, souligne la grande valeur de cette pièce unique.

Elle est exceptionnelle parce qu’il y a une majorité de cartes qui concernent le Dauphiné, et il s’agit de cartes manuscrites de la main d’un Dauphinois qui a beaucoup de liens avec le Briançonnais et sans doute aussi avec des personnages importants comme le connétable de Lesdiguières. Il livre des cartes de détail sur des vallées telles que les vallées du Queyras, du Briançonnais, de la Clarée, ou encore le Buëch. Voilà des témoins historiques et cartographiques qui étaient inconnus jusqu’à présent du grand public, mais aussi des chercheurs et des experts. Elles n’ont jamais été publiées ou étudiées par les historiens.

Les cartes, réalisées à l’encre et à l’aquarelle, se trouvent dans un « très bel état de fraîcheur » et atteignent un niveau de détail très précis, ajoute Pierre Fabry. « Chaque village ou bourg, chaque maison, chaque cours d’eau est nommé », les éléments sont « dessinés et coloriés avec soin », relèvent de leur côté les experts de la Maison de Baecque, chargée de la vente. Une quinzaine de ces cartes concernent les actuelles Hautes-Alpes, dont l’Embrunais et le Gapençais.

Au-delà de l’émerveillement restent de nombreuses questions, car le document n’est accompagné d’aucune mention précisant son commanditaire et encore moins son usage.

La principale question c’est : est-ce qu’on peut savoir le commanditaire de cet atlas ? Il y a beaucoup de cartes qui concernent le Dauphiné, le Haut Dauphiné qui correspond aux actuelles Hautes-Alpes, et aussi le Piémont, l’Italie et d’autres parties de la Provence, voire du Royaume de France. Elles sont assez luxueuses, ces cartes, par leur traitement aquarellé. Mais il n’y a pas de dédicataire. Et donc savoir, ou émettre des hypothèses, sur tel rassemblement de cartes de tel secteur géographique, ça permettrait de contextualiser ces cartes, de les mettre en rapport avec des documents d’archives, de savoir aussi si elles ont un degré confirmé d’originalité ou si Jean Videl s’est inspiré d’autres cartes précédentes comme celles de Jean de Beins.

« On est au début d’une aventure scientifique », conclut Pierre Fabry.

Le département a déboursé la somme d’environ 25 000 € pour acquérir le document, soit la dernière enchère à 20 000 € plus les frais de vente. Une demande de subvention est en cours auprès du ministère de la culture et pourrait couvrir jusqu’à la moitié de la somme.

Le service des archives se félicite que l’atlas ait pu intégrer ses collections.

Son entrée dans les collections publiques, puisqu’auparavant il était dans une bibliothèque privée, fait qu’il va prochainement pouvoir être mis à disposition de tous. Nous allons le conserver, le restaurer et le numériser, ce qui va en assurer sa diffusion dans la meilleure qualité possible à n’importe qui, gratuitement, aux Haut-Alpins, aux curieux qui veulent savoir à quoi ressemblait leur village ou leur hameau en 1661, mais aussi à la communauté scientifique internationale. On a déjà eu beaucoup de demandes d’historiens, d’archéologues, de cartographes, pour avoir accès à ces cartes.

D’ici la fin de l’année, l’atlas sera étudié à l’atelier de reliure et de restauration des archives départementales, puis sera confié à des experts en 2026 pour être restauré. Une numérisation en ligne et une exposition au public pourraient être mises en place en 2026 ou 2027.