Conférence de presse de la CGT FAPT 05 devant la boutique Orange du 11 rue Carnot à Gap, mercredi 12 juillet 2022

Orange : après trois suicides et sept tentatives en 2022, la CGT FAPT redoute une nouvelle "crise sociale"

La CGT FAPT d’Orange alerte sur le risque d'une nouvelle vague de suicides au sein de l'entreprise, à l’instar de celle de 2009. Suite à cette crise sociale interne, Orange avait été condamné en 2020 pour le harcèlement moral institutionnalisé mis en place par ses dirigeants. Mercredi 12 juillet 2022, partout en France, conférences de presse, mobilisations étaient organisées par les syndicats. Reportage de ram05 à Gap dans l’avant-dernière boutique des Hautes-Alpes.

Le ton est donné rapidement au 11 rue Carnot. Au bout d’une corde attachée à l’enseigne de la boutique Orange, un personnage en carton se balance, en chemise et cravate. Devant la vitrine, un salarié d’Orange, délégué syndical de la CGT Grand Sud Est prend la parole.

« [...] souffrances qui peuvent aller jusqu’au suicide » poursuit Philippe Assaiante rappelant les récents faits tragiques.

Le 25 mai 2022, un salarié en arrêt maladie s’est pendu sur son lieu de travail, à l’Agence de Draguignan. Le 5 juin - également en arrêt, un autre salarié a mis fin à ses jours à son domicile. Au total, depuis le début de l’année, on dénombre trois suicides au sein du groupe Orange, sept tentatives « et peut-être d’autres dont nous n’avons pas connaissance » complète le délégué syndical.

La date de cette conférence de presse, coordonnée avec une action nationale, n’a pas été choisie par hasard. Le CSE central d’Orange abordait le 12 juillet la question des suicides selon Philippe Assaiante. Mais pour ce délégué syndical, cette instance se distingue par son inutilité.

Rappel de l’historique. En 2005, Orange lance le plan NExT – Nouvelle Expérience des Télécoms, impliquant la suppression de 22 000 emplois en trois ans. 2009, l’entreprise fait déjà face à une vague de suicides. 2020, l’entreprise est condamnée pour harcèlement moral institutionnel. En clôture du procès la juge déclare que « les moyens choisis pour atteindre l’objectif fixé des 22 000 départs en trois ans étaient interdits ».

Ce jugement a-t-il changé les pratiques de l’entreprise ? L’avis de Philippe Assaiante.

Dans les faits, la politique a continué. Les fermetures de services, le manque d'effectif... tout cela continue [...] - Philippe Assaiante, délégué syndical CGT FAPT 05

Cette enquête de 2021 - que ram05 a pu consulter, est produite tous les trois ans depuis la crise sociale de 2009. Les salariés des boutiques Orange dépeignent un tableau plus noir qu’en 2019, et plus pessimiste qu’au sein des autres services. 64 % estiment avoir à effectuer une quantité de travail excessive, 93 % que celui-ci est devenu plus exigeant et 89 % qu’il « demande d’aller très vite ». Une dégradation continuelle depuis 2016 selon l’enquête, qui met en rapport la « charge de travail [...] avec les effectifs » : 61 % des managers estiment « ne pas avoir les effectifs nécessaires » soit 5 % de plus qu’en 2019.

De fait, les boutiques Orange sont dans le viseur de la direction : 38 fermetures en 2021, soit une boutique sur dix. « En 2019, la moitié des actes commerciaux se faisait en boutique, en 2021, ce n’était plus que 38 % » selon quotidien Le Monde, à qui le directeur boutiques et services clients d’Orange France expliquait en mai 2022 que la Covid avait accéléré une baisse tendancielle de la fréquentation, préexistante à la pandémie. Baisse de fréquentation car moins de boutiques de proximité ? À moins que ce ne soit l’inverse ? Les points de vue divergent entre la direction et les syndicats. Quelle que soit la réponse, la CGT n’entend pas laisser faire cette décimation du réseau de boutiques, assurant qu'elles restent rentables. Philippe Assaiante expose les revendications du syndicat.

Travailler chez Orange c’est avoir la chance de travailler dans un grand groupe. C’est aussi la certitude de faire face à minimum une restructuration tous les deux ans, de voir ses conditions de travail diminuer en même temps que le sens de celui-ci

Et le mal-être des salariés n’est que la face visible du problème. Avec un recours croissant à la sous-traitance, la maltraitance du personnel - aussi - est « externalisée ». Exemple récent, après la remise en jeu des contrats de sous-traitance d’Orange, Scopelec s’attendait à perdre 40 % de son chiffre d’affaire. Le plan de sauvegarde de l’entreprise dévoilé le 6 juillet dernier prévoit le licenciement de plusieurs centaines de salariés.