Photo : Élisa Portier

Dans le Guillestrois-Queyras, les coopératives se multiplient pour « un monde meilleur »

Le Guillestrois-Queyras est particulièrement dynamique en terme de coopératives. Ces Scic et Scop se sont retrouvées samedi pour une journée d’échanges lors de la première édition du Printemps des coopératives à Guillestre.

Dans le Guillestrois et le Queyras, les coopératives coopèrent.

Ce 26 avril, les Scic (société coopérative d’intérêt collectif) et Scop (société coopérative de production) du secteur ont organisé pour la première fois leur Printemps des coopératives, à l’occasion de l’année internationale qui leur est dédiée en 2025 par l’ONU.

Rendez-vous était donné à l’auberge de jeunesse de Guillestre, qui, d’ailleurs, a le projet de passer en coopérative, pour un après-midi convivial avec ateliers et tables de discussion au programme. Bénédicte Peyrot, présidente de la Scic Abattoir des Hautes-Vallées et très impliquée dans d’autres coopératives, présente l’objectif de l’évènement.

L’objectif de la journée, c’était de se rencontrer, de se connaître, de faire un état des lieux des différentes structures parce qu’elles ont toutes un objet social différent, une façon de faire différente, un mode de fonctionnement différent, puisqu’il y en a certaines qui ont des salariés, d’autres pas. Et ensuite de pouvoir lancer d’autres Printemps avec d’autres thèmes, et à terme de créer un réseau un peu plus formalisé, un peu plus structuré pour avoir une entité juridique qui soit plus stable et qui soit vraiment l’interlocuteur de l’ensemble des coopératives.

Bénédicte Peyrot

Particularité du Guillestrois-Queyras : il concentrerait « 100 fois plus » de coopératives que la moyenne nationale, selon les organisateurs, avec des domaines d’action variés tels que l’artisanat, l’agriculture, l’alimentation, l’énergie ou encore le tourisme.

Yves, impliqué dans plusieurs coopératives locales, donne une piste d’explication à cette forte dynamique locale.

On s’est emparé de l’outil parce qu’il y avait un déficit chez les responsables du territoire. L’abattoir : il avait fermé. La transition énergétique : les élus n’en voulaient pas. La protection des terres agricoles : les élus n’étaient pas à fond là-dessus. Donc à chaque fois, quelques individus du territoire mettent en place des outils pour compenser l’abandon des élus. Donc ce n »est pas parce qu’on est un territoire plus dynamique, c’est parce qu’on est un territoire abandonné.

Yves

Dans le cas de la Scic Les Jouets du Queyras – L’Alpin chez lui, sa naissance il y a plus d’un siècle visait à limiter l’exode de la population, raconte Corinne.

Ça a été créé pour éviter l’exode rural et éviter que les gens partent l’hiver parce qu’ils n’avaient plus de boulot dans le Queyras. On leur a donné les moyens de découper, de peindre, c’est un pasteur qui a eu cette idée-là. Et nous on a recréé une association pour relancer les Jouets quand il y a eu une faillite et une liquidation judiciaire, et maintenant on est en Scic, parce qu’on voulait impliquer tout le monde. On a ouvert et ça marche !

Corinne

Des coopératives « à taille humaine »

Parmi les coopératives du Guillestrois-Queyras, il en est une qui se distingue, par sa taille : Gens des Hauts, qui compte deux membres, est la plus petite. Sa mission : déployer des « solutions locales sur la gestion des matières organiques », telles que « les déchets alimentaires, déchets verts et résidus d’assainissement ». On écoute Sylvain et Benoît.

Essentiellement, on essaie de déployer des solutions de tri à la source des biodéchets ou d’installation de toilettes sèches, dans une optique de coopération, en mélangeant à la fois les collectivités territoriales, qui sont nos principaux clients, et puis les dynamiques citoyennes. Notre coopérative, en effet, c’est bien la coopération a minima, puisque nous sommes deux associés salariés. Ça coulait de sens de faire une coopérative dans la mesure où l’idée c’est que l’économie soit un moyen et non une finalité.

Benoît

La structure coopérative permet que l’outil de travail soit propriété de ceux qui y travaillent. Du coup, il y a une notion de durabilité. Finalement, une coopérative a son activité et les salariés peuvent tourner. Mais la coopérative reste en place, à la différence d’une structure de l’économie un peu plus classique où l’on peut dire que si les entrepreneurs s’en vont, l’activité s’arrête.

Sylvain

« Les coopératives construisent un monde meilleur » : voilà le thème de l’année internationale des coopératives 2025 des Nations Unies. Pour les participants, cela ne fait pas de doute : ces structures permettent « plus de résilience », « remettent du lien social, de l’humain », offrent des espaces de rencontre entre habitants, sont en « lien avec le territoire ».

Le mot de la fin à Benoît et Bénédicte.

Il y a cet idéal d’une transformation sociétale vers plus de coopération et plus de solidarité, moins ce sentiment que pour exister il faut écraser l’autre. Là, pour exister, il faut coopérer les uns avec les autres.

Benoît

On a toujours défini les coopératives comme étant le moyen de sauver notre système de société capitaliste à outrance et de revenir sur des choses à taille humaine, des valeurs à taille humaine, des structures à taille humaine. Sur notre territoire, on essaye d’œuvrer dans ce sens-là. c’est l’avenir.

Bénédicte Peyrot

Les interviews ont été recueillies par notre correspondante Élisa Portier.