Vers une privatisation de nos routes nationales ?

 Assistera-t-on à une privatisation progressive de nos routes nationales ? Les quelques milliards de dividendes versées chaque année aux actionnaires des sociétés autoroutières, 4,7 milliards précisément pour l’année 2016, sont durs à digérer pour les contribuables dont le porte-feuille avait financé la création de ces installations, avant que leur exploitation ne soit confiée au privé, notamment Eiffage et Vinci.

Dans ce contexte, deux amendements déposés fin mai par Joël Giraud, député des Hautes-Alpes et adoptés avec la loi LOM en juin ont fait bondir certains journalistes et spécialistes du droit, qui y voient les prémisses d’une privatisation des routes nationales.

Un de ces amendements permet de « faire porter par une délégation de service public, la création ou l’aménagement d’infrastructures à gabarit routier afin de faciliter, sécuriser ou fluidifier l’accès à une autoroute ou aux itinéraires qui la prolonge ». Traduction : donner aux sociétés d’autoroute la prise en charge de routes nationales adossées à un réseau autoroutier existant. Si d’aucun s’interroge sur les risques de dérive, vers une privatisation progressive du réseau de routes nationales, Joël Giraud, La République En Marche s’en défend, en rappelant que le droit à l’adossement est un droit européen clairement défini.

Cette possibilité de confier à des sociétés autoroutière des portions de routes au gabarit routier « 2x1 voie » existait déjà mais nécessitait un texte législatif au cas par cas. Cet amendement va donc simplifier la démarche à entreprendre pour privatiser ces portions.

Quel objectif ? Si l’on prend le cas de l’A51 et de sa sortie à La Saulce, des travaux d’aménagement permettant une meilleure liaison jusqu’à la rocade de Gap pourraient être pris en charge par le concessionnaire, se qui pour Joël Giraud est une bonne nouvelle dans un contexte où les porte-feuilles des collectivités sont vides.

Dans le cas d’une prise en charge de portions de nationales adossées à des autoroutes, les travaux d’aménagement et d’entretien incombent donc aux sociétés d’autoroute,

mais cela ne se fait évidemment pas sans contrepartie. Deux types de contrepartie sont possibles : l’augmentation de la durée de la concession de l’autoroute en question, ou une augmentation des tarifs aux péages de cette même autoroute. Joël Giraud se dit plus favorable à la seconde option.

Enfin en ce qui concerne plus directement l’A51, Jean-Marie Bernard, président du département des Hautes-Alpes, se dit très favorable à cette opportunité de faire réaliser les travaux nécessaires par le concessionnaire autoroutier.

Reste que si le département n’aura pas un sou à verser pour ces aménagements, les utilisateurs, eux, risquent de voir leur budget autoroute partir à la hausse. Un comble au regard de la crise des gilets jaunes qui dénonçaient justement les dividendes indécents versés aux actionnaires des sociétés d’autoroute.

Retrouvez l'article en podcast dans notre journal : https://www.ram05.fr/journal-99/

Pour aller plus loin :

https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-mardi-18-juin-2019

https://www.marianne.net/economie/chassee-par-la-porte-la-privatisation-des-routes-nationales-revient-par-la-fenetre-lrem

https://www.liberation.fr/checknews/2019/06/23/une-privatisation-des-routes-nationales-est-elle-envisagee-par-le-gouvernement_1734349